jeudi 5 septembre 2013

Le Yoga respirer c’est vivre

J’ai rarement rencontré un être humain aussi désemparé il était assis devant moi, pâle, les traits tirés, son cou décharné flottant dans le col de sa chemise devenu trop large. Il venait me voir sans grande conviction, sur le conseil d’un ami pour m’exposer son problème. Quand je dis « exposer » n’imaginez pas qu’il me raconta tout simplement ses ennuis : son état d’épuisement et de nervosité était tel, qu’il était incapable d’en faire le récit cohérent. Il me lisait des notes préparées pour notre entrevue. Je vous fais grâce des détails. Marié, il avait eu, voici quelques années un choc émotif dont il ne m’a pas précisé la nature et depuis, sa santé se délabrait progressivement.
Il souffrait de troubles digestifs, de palpitations, d’irritabilité, de manque de concentration. Il maigrissait à vue d’oeil, perdait le goût de vivre, était à bout de courage. Il avait changé d’emploi depuis peu mieux rémunéré, il se sentait hélas dépassé par ses nouvelles responsabilités. Le lendemain, un travail important l’attendait qu’ils estimait incapable d’accomplir. Il avait l’intention de l’avouer â son nouveau patron et de donner sa démission.
Que faire ? La gymnastique lui était interdite car le moindre effort l’épuisait. J’étais fort embarrassé j’aurais voulu l’aider, mais il semblait exclu de lui faire pratiquer du yoga, même ultra élémentaire.
Pour faire le point, je lui demandai d’ôter son veston, de se coucher sur le tapis et de respirer calmement. Ne remarquant aucun mouvement respiratoire à l’abdomen ni au thorax, je lui dit « Ne retenez pas votre souffle
Mais. je ne le retiens pas, je respire normalement,., fut la surprenante réponse.
— Alors respirez aussi profondément que vous pourrez. Il fit un effort, et sa poitrine se souleva., d’un centimètre Je palpai l’abdomen il était dur et contracté. Cet homme était à ce point contracturé qu’il ne respirait pratiquement pas, tout juste assez pour ne pas mourir asphyxié. Cela expliquait bien des choses I Il me regarda ahuri lorsque je lui appris qti sa respiration était presque inexistante il ne sen était jamais rendu compte, ni personne d’ailleurs Après un demi-heure d’essais, il réussit à se décontracter un peu et à respirer du ventre. Ce n’était pas formidable, bien sûr, mais comparé à son état précédent, il inspirait au moins cinq fois puis d’air qu’auparavant.
Trois quarts d’heure plus tard, timidement, une touche de rose apparut sur ses joues, un pâle sourire éclaira son visage et... il était capable de parler sans notes
Ne croyez pas que tout fut simple par la suite, mais, par la magie du souffle, ce corps humain revint à la vie, comme une plante étiolée qu’on arrose.
Avec l’aide de son médecin, ii est en voie de reprendre une vie normale.
Ceci est un cas extrême mais impressionnant, el depuis ce jour, plus que jamais, j’accorde une importance primordiale à la respiration j’observe que, presque sans exception, les personnes qui ont une cage thoracique bien développée — et qui s’en servent ! — vivent sans problèmes,

C’est-à-dire réussissent à les résoudre au fur et à mesure qu’il s’en présente. Ceux qui respirent mal se débattent dans des difficultés sans nombre, dans tous les domaines’ santé, profession, affectivité. Ils sont — hélas — la majorité car, en fait, nous respirons tous plus ou moins mal! Combien de pauvres poumons de civilisés ne sont jamais ventilés à fond!
La respiration est le grand volant vital. Il est possible de se passer de nourriture solide durant des semaines, de boisson pendant quelques jours: privés d’air nous passerions en peu de minutes de vie à trépas.
Tous les phénomènes vitaux sont liés à des processus d’oxydation et de réduction: sana oxygène, pas de vie. Nos cellules dépendent du sang pour leur approvisionnement en oxygène. Qu’un sang pauvre en oxygène circule dans vos artères et la vitalité de chacune de vos cellules s’en trouve amoindrie: « réalisez * cette vérité première, imprégnez- vous-en, rendez-vous compte que des milliards de cellules, prêtes à vous servir fidèlement jusqu’au bout de leurs forces, sont tributaires de l’apport d’oxygène qui leur parvient par l’intermédiaire de ce liquide magique: le sang. Votre devoir, au sens strict, est de leur assurer cet approvisionnement en oxygène auquel Ils ont droit.
Non seulement nous respirons très mal, mais souvent la qualité de l’air respiré est plus que douteuse, d’où notre manque de résistance aux maladies, à la fatigue, notre iépugnance à tout effort physique, notre nervosité, notre irritabilité.
L’apport d’oxygene est un aspect seulement de la fonction respiratoire qui comprend aussi le rcjet du C02. Les cellules ne disposent d’aucun autre moyen de se débarrasser des déchets qu’elles produisent, à part celui de les déverser dans le sang et la purification a lieu notamment dans les poumons. De plus, dans les poumons mal ventilés d’innombrables germes peuvent se développer dans l’obscurité tiede et humide qui leur est favorable. Le bacille de Koch ne résiste pas à l’action de l’oxygène: la respiration correcte en assurant la ventilation complète des poumons Immunise contre la tuberculose.
Bien sûr nous n’avons pas attendu les Yogis pour respirer! Mais en pratiquant leur art de respirer, vous vous rendrez compte à quel point vous respiriez mal avant!
Il y a autant de différence entre la façon dont respire un adepte du Yoga et un non initié, qu’entre un gamin qui barbote dans un étang et un champion. Le premier se débat, dépense beaucoup d’énergie et arrive à peine à flotter et à se déplacer, le second avance vite et sans effort. Toute la différence vient de la technique et de l’exercice.
Apprenons à respirer correctement, la récompense sera merveilleuse!
Voici les bénéfices que Swaml Sivananda attribue à la respiration yogique: Le corps devient fort et sain ; l’excès de graisse disparaît, Je visage resplendit, les yeux scintillent et un charme particulier se dégage de toute la personnalité. La voix devient douce et mélodieuse. La maladie n’a plus de prise sur l’adepte. La digestion se fait avec aisance. (Souvenez-vous de l’appétit que vous ressentez après une longue marche en plein air). Le corps tout enfler se purifie, l’esprit se concentre aisément. La pratique constante éveille les forces spirituelles latentes, amène le bonheur et la paix.* Avant votre naissance, maman respirait pour vous. Mais dès votre venue au monde, lorsque la teneur en C02 de votre sang augmenta, le centre respiratoire déclencha votre première et profonde inspiration. Dans la cage thoracique, les poumons se déplissèrent: vous veniez de poser votre premier acte autonome. Depuis lors, flux et reflux du souffle rythment votre vie jusqu’au dernier soupir. Pour reprendre l’expression de C. L. Schleich, dès que la sage- femme tranche le cordon ombilical, les poumons deviennent le placenta qui relie l’homme à la mère cosmique.
Vivre c’est respirer — respirer c’est vivre et les yogis mesurent la durée de la vie humaine en nombre de respirations.